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Jui
Chambéry
Date : 23 Juin 2025, 14:30

27 personnes avaient répondu à la proposition de visite de Savoie-Technolac, élaborée par Jean-Jacques Duchêne, son ancien directeur et membre de notre Conseil d’Administration.

Dès 8 h 45, Régis Dormoy, directeur général de Chambéry-Grand Lac Économie, est venu présenter cette nouvelle structure qui regroupe, depuis 2017, les services de développement économique de Grand Lac et de Grand Chambéry, en substitution de l’organisation initialement constituée en 1985, avec le Conseil Général.

Jean-Jacques Duchêne a ensuite présenté l’histoire de Savoie-Technolac :

En Août 1983, le gouvernement décide de fermer la base aérienne du Bourget-du-Lac, provoquant par contrecoup le départ de 1 000 militaires qui, avec leurs familles, faisaient vivre Le Bourget-du-Lac, et les communes proches. 100 hectares de terrains et de nombreux bâtiments techniques ou de formation vont être abandonnés sur la rive sud du lac du Bourget.

Tandis que le député Louis Besson réfléchit à comment mieux exploiter pour le territoire les fortes compétences scientifiques et industrielles qui fourmillent au sein du sillon alpin (de Grenoble à Genève), tout en s’ignorant les unes les autres, le Conseil Général s’inquiète fort de la désindustrialisation progressive des vallées de Maurienne et de Tarentaise, au vu de l’évasion des grands groupes vers la Chine ou ailleurs. De son côté, l’Université craque dans ses murs à Jacob-Bellecombette et ne sait comment faire face à une croissance de ses effectifs, supérieure à 10% l’an. Cette conjonction de difficultés, d’intentions, et d’opportunités génère rapidement un consensus politique pour un projet de « Technopole » : un parc technologique d’ambition départementale, sinon nationale ; une sorte d’amplificateur, d’accélérateur synergétique des collaborations entre recherche, enseignement supérieur, et entreprises innovantes, le tout au service de l’innovation technologique et des brevets, à l’exemple de la Silicon Valley et de Sophia Antipolis, très en vogue à ce moment-là. L’opinion publique, professionnelle et syndicale, associée à la réflexion, se montre très favorable au projet. Sous la présidence de Michel Barnier, le Département s’associe alors aux communes du Bourget-du-lac et de la Motte-Servolex pour fixer les objectifs et se donner les moyens de les atteindre. Un groupement ad’hoc est constitué pour piloter le projet (SYPARTEC). Jean-Pierre VIAL en prend la présidence et missionne, dès 1985 sur le terrain, une petite équipe opérationnelle pour assurer la conception et la réalisation. Jean-Jacques Duchêne fait partie de cette équipe improvisée qui agrège également quelques aventuriers issus de l’agence économique et la CCI de Savoie. L’urbaniste Jean-Louis Chanéac dessine le plan prospectif à trente ans ; la Société d’Aménagement de la Savoie se charge de la conduite des travaux d’aménagement. Un brainstorming à l’Ecole de Commerce invente le nom « Technolac » que Michel Barnier précède de « Savoie », pour imprimer définitivement la dimension départementale du projet. La préoccupation environnementale s’installe d’emblée dans la mission (en 1993, Michel BANRIER deviendra ministre de l’Environnement, et Savoie Technolac sera certifié ISO 14001 dès 2001). En parallèle se préparent les Jeux Olympiques d’Albertville avec de grands chantiers savoyards (autoroutes, bâtiments, réseaux, équipements sportifs, …) emportant une véritable révolution dans le BTP départemental. 

Les négociations foncières avec l’Etat sont menées tambour battant, sur un modèle dit de la « convention de Verdun » (paiements au coup par coup, selon l’avancement des ventes aux entreprises). Sur le total de 100 hectares, 12 sont attribués à l’Université (la partie base-école et ses salles de formation) et au CROUS (logements et mess sous-officier). Le reste au SYPARTEC. Des accords sont négociés avec Dominique PACCARD, président de l’Université, pour localiser les filières scientifiques et technique sur Savoie Technolac, en contrepartie du portage, par le Département, de la construction des locaux universitaires. C’est là une véritable innovation nationale en la matière. Michel BARNIER agit également aux coté de Dominique PACCARD pour obtenir la création d’une école d’ingénieur (ESIGEC, devenue POLYTECH) et d’un IUT en Savoie (en complément de celui de Haute-Savoie). 50 TUC sont recrutés pour assurer l’entretien et la surveillance du site désormais désert. 10.000 arbustes sont plantés en préfiguration des futures rues du technopôle, et sont protégés contre les lapins, nombreux et aux incisives affûtées. Petit à petit, les premières entreprises s’installent : IFM Electronic dans l’ancien PC des Moyens Généraux, la petite équipe opérationnelle et la pépinière d’entreprises dans le PC Base, la Section Protos (une création de Jean BAUD, élu et prof chambérien) dans le HM3, etc. De nouvelles constructions émergent à la place de la soute à munitions ou de la fosse à kérosène (décontaminées dans les règles) pour accueillir les 150 ingénieurs du CNEH, la section d’ingénierie hydraulique d’EDF (500 personnes aujourd’hui sur place, plus de 1000 en France), puis d’autres projets. Tous passent l’examen préalable du Comité d’Agrément. On ne s’établit pas librement à Savoie Technolac : il faut avoir le profil voulu pour devenir un acteur effectif de l’écosystème synergique projeté. En 2022, le technopôle savoyard regroupe 240 entreprises, dont 50 % interviennent dans la filière énergies renouvelables (et technologies associées). 60 ont une dimension internationale, et 80% sont nées dans l’incubateur de start up (un des plus importants de la région Rhône-Alpes-Auvergne). Le site accueille aujourd’hui 4000 emplois, 1000 chercheurs, 6000 étudiants. C’est mieux que les 1000 militaires d’antan, voire que le désert laissé après la fermeture de la base. La renommée du technopôle savoyard, moqué des grandes métropoles au départ, est désormais établie au plan national comme Pôle d’Excellence Energie et Réseaux.

Comme notre sortie est intitulée « Savoie-Technolac des entreprises », Jean-Jacques Duchêne ensuite nous conduit chez :

ATAWEY :  Jean-Michel Amaré, son président, nous présente cette entreprise fondée au sein de l’incubateur en 2011, spécialisée dans la conception et la fabrication de stations d’approvisionnement pour la mobilité hydrogène. Il nous explique le parcours qu’il a suivi avec son associé, d’ingénieur alimentaire à créateur d’ATAWEY, avec l’accompagnement de Savoie Technolac. Deux personnes au départ, 150 aujourd’hui sur trois sites et 18M€ de CA (2M€ en 2021). 400 salariés sont prévus dans les cinq prochaines années.

INES (Institut National de l’Energie Solaire) : Hervé Druon, Directeur d’INES Plateforme Formation & Evaluation, nous reçoit devant le spectaculaire bâtiment Helios, dont la façade est ornée d’un immense cadran solaire… orienté au Nord. Il nous présente rapidement l’INES, troisième centre mondial de recherche en matière solaire, riche de 500 ingénieurs-chercheurs (CEA, CNRS, Université) travaillant en lien avec l’industrie.  Il nous fait visiter la plateforme de formation, où 2000 stagiaires transitent chaque année.

INCUBATEUR de START UP : Hervé Laurent, son directeur, nous reçoit dans l’incubateur de projets innovants, combiné à l’accélérateur de start up « The Village » du CRCA, et à la pépinière d’entreprises pour les jeunes, étudiants ou pas, qui ont un projet en tête. En plusieurs étapes, l’idée innovante d’une personne ou d’une start-up peut être travaillée, accompagnée et réalisée. Elle vient ensuite nourrir le tissu économique, comme l’ont fait 80% des entreprises de Savoie Technolac. Nombreuses sont également celles qui se sont déployées sur le reste du département.

Nous déambulons ensuite dans l’Université, installée entre autres dans les anciens locaux de la Base Aérienne, mais également dans de nouveaux, construits dès 1990 avec le concours d’architectes d’envergure et créatifs comme Patriarche, Barbeyer, Dupuis… Savoie Technolac est l’un de trois sites d’établissement de l’Université Savoie-Mont-Blanc avec Jacob-Bellecombette et Annecy-le-Vieux. Un étudiant sympathique, rencontré en passant, témoigne de son expérience. Ils viennent de Savoie, de Haute-Savoie et d’ailleurs. Les effectifs continuent de croître.

Et nous sommes finalement accueillis par Mmes Suzanne Cornier et Nathalie Garnier à l’Institut National des Arts et Métiers, qui forme chaque année 125 élèves en recherche, éco-conception et valorisation des produits. Les Arts et Métiers disposent de huit campus en France ; celui de Savoie Technolac est rattaché au campus de Cluny.

Luc Berthoud, Maire de La Motte-Servolex, qui nous a rejoints à mi-parcours, développe le projet (en cours) de l’extension de Savoie-Technolac, projet qui pourrait accueillir à la fois de la petite industrie durable, le développement d’entreprises du site, et du maraîchage. Il précise aussi que, sur le site, tout bâtiment est lié par un bail à construction de 60 ans, dispositif contractuel qui assure aux décideurs politiques la pérennité du projet initial, la nature des activités, l’entretien des bâtiments par l’utilisateur, et la restitution à la collectivité en cas de cessation ou en fin de bail. Il nous fait également part des arguments des opposants à ce site.

La visite se termine à 12 h 30. Les ingénieurs du groupe ont été passionnés. Les néophytes ont un peu mieux compris ce qu’était Savoie-Technolac, et ont été passionnés aussi. Tous ont compris que la vie future profitait des recherches et procédés mis en commun et développés dans ce lieu atypique.  L’Association remercie Jean-Jacques Duchêne, notre cicérone expert, et tous ceux qui ont pris un peu de leur temps pour nous parler de ce lieu extraordinaire.

Une réalisation WATOOWEB

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